Catégories
Import / Export

Incoterms, Douane et TVA : maîtrisez vos obligations déclaratives à l’international !

Les Incoterms® ne sont pas qu’un sigle de trois lettres apposé sur une facture : ils répartissent de façon précise les risques, les coûts et les responsabilités documentaires entre vendeur et acheteur à chaque étape du transport international.

Un mauvais choix peut entraîner des litiges, des dépenses imprévues et, surtout, des erreurs de conformité douanière ou fiscale. Voyons ensemble l’impact concret des Incoterms® 2020 sur les déclarations douanières (export / import) et la TVA dans les opérations des entreprises françaises.

Incoterms® 2020 : quatre familles, un même fil conducteur

La version Incoterms® 2020 se répartit en quatre familles, identifiées par une lettre :

  • Groupe E (Departure) : EXW (Ex Works). Le vendeur met la marchandise à disposition dans ses locaux ; l’acheteur assume la quasi-totalité des formalités et des coûts.
  • Groupe F (Main Carriage Unpaid) : FCA, FAS, FOB. Le vendeur livre au transporteur désigné par l’acheteur, mais ne contracte pas lui-même le fret international.
  • Groupe C (Main Carriage Paid) : CPT, CIP, CFR, CIF. Le vendeur organise et paie le transport principal, mais le risque bascule à l’acheteur dès l’expédition.
  • Groupe D (Arrival) : DAP, DPU, DDP. Le vendeur supporte la totalité du transport jusqu’au lieu de destination convenu, avec des obligations croissantes de dédouanement et de paiement des droits et taxes.

Chaque règle fixe un point de transfert : c’est à cet endroit que passent généralement les formalités douanières. En pratique, plus le vendeur conserve les risques, plus il assume le dédouanement (et inversement). Par exemple, sous CIP (groupe C), le vendeur doit souscrire une assurance minimale couvrant 110 % de la valeur, tandis qu’en DPU, il organise même la livraison jusqu’à quai, sans engager de frais de manutention du dernier kilomètre.

La bonne compréhension de ces quatre familles permet non seulement de maîtriser les coûts logistiques, mais aussi de sécuriser la preuve d’exportation (et donc l’exonération de TVA) et de réduire les risques de litiges ou de contrôles fiscaux.

Qui endosse les formalités ?

L’entité désignée dans l’Incoterm apparaît sur la déclaration en douane (DAU/ECS) et engage sa responsabilité réglementaire. Voici quelques exemples concrets :

  • EXW : l’acheteur doit obtenir un numéro EORI, effectuer la déclaration d’exportation et organiser le transport, ce qui peut allonger les délais et compliquer la négociation avec les transitaires locaux.
  • FCA : le vendeur livre au terminal (port ou aéroport) avec un connaissement ou une lettre de transport aérien à son nom ; il gère la déclaration export et obtient la preuve documentaire (ECS), garantissant son exonération de TVA, tout en laissant à l’acheteur la charge du fret principal.
  • FOB / CIF : pour le maritime, le vendeur affrète le navire (CIF) ou livre sur le navire (FOB), prépare le manifeste et coordonne le chargement ; l’acheteur prend en charge l’importation dès la mise à bord.
  • DAP / DPU : le vendeur supporte l’acheminement jusqu’au lieu convenu (entrepôt ou quai), mais l’acheteur effectue les formalités d’importation et prend en charge les droits et taxes, sauf en DDP où le vendeur s’en charge.
  • DDP : le vendeur doit détenir une immatriculation fiscale locale (par exemple un numéro TVA intracommunautaire s’il s’agit d’un pays de l’UE ou un représentant fiscal hors UE), effectuer la déclaration d’importation et régler les droits et la TVA, puis transmettre les factures et justificatifs à l’acheteur.

Avant de proposer un Incoterm à vos clients ou fournisseurs, assurez-vous donc de votre capacité à remplir ces obligations : disponibilité d’un EORI, accès aux systèmes douaniers (DELTA en Belgique, NCTS ou ICS pour l’UE), possibilité de mandatement d’un commissionnaire en douane, etc.

TVA : exonération à l’export, autoliquidation à l’import

Pour une vente hors UE, la TVA française est exonérée (article 262 I du CGI) à condition de disposer d’une preuve d’exportation (DAU/ECS). Sous EXW, le vendeur dépend de l’acheteur pour obtenir ce justificatif ; sous FCA, FOB, CIF ou DAP, il l’obtient lui-même.

À l’importation en France, la TVA est en principe autoliquidée sur la déclaration de TVA (CA3) par l’acheteur, sauf en DDP où le vendeur étranger la paie : l’acheteur doit alors s’assurer de la bonne exécution et de la possibilité de déduction. Dans les échanges intra-UE, l’Incoterm influe sur la logistique, mais pas sur le mécanisme d’autoliquidation : livraison intracommunautaire exonérée pour le vendeur, acquisition autoliquidée pour l’acheteur.

Tableau récapitulatif simplifié

Incoterm® Dédouanement export Dédouanement import Paiement droits & taxes import TVA export (vendeur FR) TVA import (acheteur FR)
EXW Acheteur Acheteur Acheteur Preuve incertaine Autoliquidation
FCA Vendeur Acheteur Acheteur Exonération assurée Autoliquidation
FOB / CIF Vendeur Acheteur Acheteur Exonération assurée Autoliquidation
DAP / DPU Vendeur Acheteur Acheteur Exonération assurée Autoliquidation
DDP Vendeur Vendeur Vendeur Exonération assurée TVA payée par vendeur

Ce tableau simplifie la réalité : les clauses contractuelles détaillées priment toujours.

Bonnes pratiques pour sécuriser vos flux

Le choix de l’Incoterm doit reposer sur une analyse de vos capacités internes et de celles de votre partenaire, pas uniquement sur le tarif du fret. Voici quelques recommandations concrètes :

  • Audit périodique des procédures douanières et fiscales pour identifier les points de friction et mettre en place des plans d’action.
  • Veille réglementaire continue pour anticiper les évolutions des régimes de TVA et des formalités douanières (sanctions, quotas, certifications).
  • Digitalisation des échanges de documents (DAU/ECS, certificats d’origine, licences) via une plateforme sécurisée pour réduire les erreurs manuelles et accélérer les contrôles.
  • Rédaction de clauses spécifiques dans vos contrats de vente et d’achat, précisant les responsabilités, les pénalités en cas de manquement et les modalités de mandatement à un représentant fiscal ou douanier.
  • Formation régulière de vos équipes opérationnelles (commerce international, douane, comptabilité) et réalisation de simulations de contrôles pour maintenir un haut niveau de conformité.
  • Choix d’un prestataire fiable (commissionnaire en douane, transitaire) avec des SLA clairs et la possibilité d’un accompagnement en cas de litige ou d’audit.

Le choix de l’Incoterm® est un véritable levier stratégique : il détermine qui gère les formalités douanières, qui acquitte la TVA d’importation et qui détient la preuve d’exportation.

Prendre le temps d’analyser vos flux, d’adapter vos contrats et de vous entourer d’experts vous permettra d’éviter les coûts cachés et de sécuriser durablement vos opérations internationales.